braniya chiricahua




L'ancien se meurt, le nouveau ne parvient pas à voir le jour. Dans ce clair-obscur surgissent des monstres.
Antonio Gramsci

mardi 18 mars 2014

ÉPHÉMÉRIDES (4) : HARO SUR LE BTS !


Les analystes et observateurs de la scène « politique » algérienne se perdent en conjectures sur la signification exacte du retour en force de deux anciens « Premiers » ministres : Ahmed Ouyahia, nommé ministre d'état, directeur de cabinet du Président de la république ( = Khodja du Dey) et Abdelaziz Belkhadem, nommé ministre d'état, conseiller spécial du Président (= rien, emploi fictif).

Les suppôts de la SM veulent voir là une revanche de leur chef, Médiène, arguant que Ouyahia est proche de lui. (Mais alors quid de Belkhadem ? ) Nous, on ne voit pas pourquoi Ouyahia serait assez stupide pour lier son sort à un Médiène qui a un quintal de plomb dans l'aile et qui se rapproche du sol à la vitesse V. Les larbins de la SM, encore traumatisés par la volée de bois vert à leur Dieu assénée par le drabki, s'essaient à la méthode Coué : « Allez les gars ! On y croit ! ». C'est ça, croyez-y...

Ces gens-là ne se sont pas avisés de deux faits qui n'ont l'air de rien mais qui expliquent beaucoup de choses. Il s'agit des deux petites phrases prononcées par le transfuge du RCD, Amara Benyounès (qui a rejoint, précédé en cela par la gauchiste-féministe Khalida Toumi,  Dar Es-Soltane où il y a une grande mangeoire) et par le Premier ministre  (qui a revêtu les habits de commis voyageur du Dey). Le premier a dit « Maudits soient ceux qui ne nous aiment pas ! » et le second : « À Constantine, on dit : "Chaoui, sauf ton respect" ». Il ne faut pas être grand clerc pour comprendre que les propos des deux hommes visaient leur ennemi N°1, le BTS et son candidat à la désignation deylicale, Ali Benflis. 

Les nominations des deux anciens Premiers ministres apparaissent  dès lors sous leur vrai jour : un Kabyle et un Oranais pour renforcer le front anti-BTS. Les petites phrases, elles, ont pour fonction d'exciter « l'ennemi » et de l'amener à donner de lui-même l'image dégradante de la foule hystérique (dont les musulmans, sous toutes les latitudes, offrent le spectacle lamentable, chaque fois qu'ils estiment leur religion profanée. Mais à ce compte-là, que devraient dire -et faire- les Chrétiens ?). Et ça a marché ! Avec, à l'avant-garde de la foule vociférante, les étudiants de l'université Hadj-Lakhdar de Batna ! 

Si les éditorialistes et autres chroniqueurs des médias ne s'avisent pas de cette lecture des faits, c'est parce qu'ils sont aveuglés par leur croyance en la « politologie » positiviste à la mode occidentale. Et de ruminer à partir des catégories creuses et ronflantes : État (y a-t-il vraiment un État en Algérie?), Nation (les Algériens sont-ils vraiment aptes à vivre ensemble?), Institutions (lesquelles?), Société civile (où est-elle, où?)... Mais s'il n'y rien de tout cela, qu'y a-t-il alors ? 

Utilisons une métaphore freudienne pour éclairer notre propos. Dans sa longue marche vers la réalisation de soi (= la génitalité adulte), la libido peut être représentée par une armée qui avance de garnison en garnison (= les stades de la sexualité) avec, à chaque étape, un délestage en hommes pour protéger la garnison (= intensité de la satisfaction), nous dit Freud. Supposons, ajoute-t-il, que l'armée ait à affronter un ennemi quelconque (= difficulté de se satisfaire), maintenant que ses effectifs sont insuffisants, qu'aura-t-elle tendance à faire ? À revenir en arrière, vers la garnison où elle a laissé le plus d'hommes (=là où sa satisfaction a été la plus grande, la libido infantile). 

La marche de la société algérienne vers la réalisation de soi (= la satisfaction de ses aspirations à la liberté et à la prospérité) ayant été entravée plusieurs fois (par le socialisme de la misère et l'islamisme des gueux, tous deux congruents avec le despotisme asiatique des soudards de l'Odjaq), cette société régresse vers son stade infantile = le tribalisme et le maraboutisme. Les segments modernistes de la société ne suffisent plus à donner le change, il faut en prendre acte. Le clanisme tribal musclé plastronne sans vergogne et c'est cela qui confère sa couleur à l'ensemble de la problématique algérienne.

Un dernier mot pour finir en rêvant : quelle plus intelligente riposte auraient pu trouver les étudiants de Batna que celle de proposer de rebaptiser leur université BACHIR CHIHANI (et de réserver le nom de Hadj-Lakhdar à la mosquée du 1er novembre 1954 pour la construction de laquelle il s'est tellement investi). 

Bachir Chihani, natif d'El Khroub, lettré bilingue et badissi pur sucre, militant du MTLD à Béchar (!) et dans l'Aurès (où il a appris le chaouiya), bras droit et homme de confiance de Mostfa Benboulaïd, remarquable organisateur et baroudeur, ('Abdelhamid Benzine m'a dit beaucoup de bien de lui) assassiné par les tribalistes barbares (Abbès Laghrour et 'Adjoul 'Adjoul), Bachir Chihani symbole s'il en est de patriotisme moderne.

2 commentaires:

  1. Bonjour Messaoud
    Adjoul Adjoul, comme le patronyme n'était pas suffisant, la tribu a pensé confirmer avec le prénom....il fallait conjurer l'humain, sait-on jamais ? Ce chaoui pur sang a sauvé sa peau en se rendant aux autorités militaires françaises. Il avait vendu tous ses amis. Le plus curieux est qu'en 62 il était resté là jusqu'à sa extinction de mort naturelle sans que personne ne lui fasse le moindre reproche.

    Bachir Chihani mérite certainement mieux que l'université de Batna, rendue tristement célèbre par les batailles rangées entre tribus qui se projettent dans leurs rejetons. L'université de Khenchla est baptisée Abbes Laghrour. C'est parfait, là, les tribus s'affrontent régulièrement et tout le monde est content. Faudra maintenant construire quelque chose pour Adjoul Adjoul.
    http://www.elwatan.com/hebdo/etudiant/bataille-rangee-entre-etudiants-05-03-2014-248002_264.php
    Université Adjoul Adjoul sonnerait mieux.

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  2. Salut à toi,

    Oui, j'avais lu (à ma grande honte) ce reportage. Le 02 novembre 1954, Jean Servier (l'ethnologue, membre du BLNA et bon connaisseur des tribus de l'Aurès) a formé la première harka de la guerre avec la puissante tribu des Ouled 'Abdi. Comment ? Voici ce qu'en dit, en substance, Yves Courrière (in Les fils de la Toussaint) :
    Servier qui se trouvait à Arris en ce 02 novembre, se souvint de la rivalité entre la tribu des Ouled 'Abdi et celle des Touabas (dont était issu Mostfa Benboulaïd, l'homme qui venait de déclencher les hostilités). Il dit aux Ouled 'Abdi que c'étaient les Touabas qui étaient entrés en rébellion. Les Ouled 'Abdi lui demandèrent alors de leur donner des fusils, ajoutant : il y a longtemps qu'on dit qu’on ne devait pas les laisser vivre ces fils de chiens.
    Servier fit armer les Ouled Abdi et les fit encadrer par des Européens...

    On répète à l'envi que le premier coup de feu a été tiré dans les Aurès. Il faut également rappeler que c'est aussi là que fut formée la première harka.

    P.S. Dans le texte de présentation du livre de Jean Servier, Les Berbères, il est dit : « Cependant, les Berbères portent en eux, comme un gène létal, la division, l'amour du clan poussé jusqu'à la haine du clan voisin qui les amène à soutenir un ennemi commun, le temps d'une vengeance. »

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