L’ex-bon
élève du Maghreb qui cumulait excédent commercial, croissance
soutenue et faible endettement voit sa situation se détériorer à
toute allure du fait de l’effondrement des cours du pétrole. Avec
un baril à 110 dollars, l’Algérie pouvait financer un
État-providence qui achetait la paix sociale dans ce pays où près
de 30% des jeunes sont au chômage. À 35 dollars, elle est
contrainte de tailler dans les subventions des produits de base, de
relever le prix de l’essence et de l’électricité, d’imposer
des quotas d’importations. Le gouvernement redoute une crise
sociale majeure.
96%
L’économie
de l’Algérie repose depuis des décennies sur le gaz et le pétrole
qui représentent 96% de ses exportations, près de la moitié de son
PIB et 60% des recettes budgétaires de l’État. Autant dire que
l’effondrement des prix est une catastrophe. Les revenus pétroliers
du pays ont chuté de 70% depuis l’été 2014 a rappelé dans un
communiqué le président Bouteflika la semaine dernière avant
d’avertir ses concitoyens qu’ils allaient devoir affonter des
temps difficiles. L’Algérie est un des pays les plus touchés par
cet effondrement avec le Venezuela et la Russie.
750
milliards de dollars
Ce
sont les rentrées colossales générées par les exportations de
pétrole et de gaz entre 1999 et 2014. L’Algérie est le cinquième
pays producteur de gaz et le 13ème producteur de pétrole. Problème,
cette manne a très peu été investie dans le développement de
l’économie nationale : elle a surtout servie à acheter la
paix sociale en finançant des produits de première nécessité
comme le lait, le sucre, la farine ou l’électricité et des
augmentations de salaires versés aux fonctionnaires et employés des
entreprises publiques.
+40%
L’augmentation
du prix de l’essence depuis le 1er janvier est liée à la réaction
du gouvernement qui n’a plus les moyens de subventionner des
dizaines de produits, ce qui était pour lui le moyen de soutenir le
pouvoir d’achat des Algériens. Un pouvoir d’achat déjà amputé
par l’affaiblissement de la monnaie, le dinar qui a baissé de 15%
en un an par rapport à l’euro. Le gouvernement a aussi décidé de
tailler dans les grands projets d’infrastructures, en reportant des
chantiers de nouvelles autoroutes et des créations de lignes de
tramway dans plusieurs villes. Tant pis pour le chômage qui grimpe.
12,7%
Le
taux de chômage qui frappe 1,33 million de personnes, monte depuis
deux ans. Il touche massivement les jeunes (moins de 25 ans) et le
ralentissement de l’économie n’améliore pas leurs perspectives
bien au contraire : en un an seulement, leur taux de chômage
est passé de 25,2% à près de 30%, selon l’Office National de la
Statistique.
-13,7
milliards de dollars
La
balance commerciale du pays est déficitaire pour la première fois
depuis un quart de siècle, plombée par l’effondrement des
recettes liées aux hydrocarbures. Or les Algériens importent tout
ce qui entre dans leurs magasins, même les dattes, les oranges ou la
semoule. En janvier, le gouvernement a donné un coup de frein en
mettant en place des licences d’importations sur les véhicules et
le ciment notamment. Objectif ? Réduire la facture des
importations bien sûr : le quota d’importation de véhicules
a ainsi réduit de moitié (à 152 000 unités) par rapport au nombre
importé l’an dernier. Malgré cela le ministère des Finances
prévoit un nouveau déficit de la balance commerciale à hauteur de
26 milliards en 2016.
2
381 741 km2 : l’Algérie est par sa taille le plus grand
pays du continent africain et le plus grand pays arabe. Sa superficie
est quatre fois plus importante que la France, mais sa population qui
atteindra 40 millions d’habitants en 2016 est inférieure d’un
tiers. Au sein de celle-ci les jeunes sont toujours plus nombreux :
46% des algériens ont moins de 25 ans.
1
million: c’est le nombre de postes de fonctionnaires que le
gouvernement envisage de supprimer afin de mieux encaisser le choc de
la chute du pétrole. Un dégraissage colossal puisqu’il
concernerait 40% de l’ensemble des 2,5 millions de fonctionnaires
et qui du coup, pourrait déclencher un conflit social de grande
ampleur dans un pays où la tension monte depuis des mois du fait des
mesures d’austérité annoncées jour après jour.
208
milliards de dollars: Le PIB en recul du fait de la chute du
pétrole reste tout de meme le premier du Maghreb et le quatrième
du continent derrière ceux du Nigéria, de L’Afrique du Sud et de
l’Egypte. Hors effet pétrole, il a même encore légèrement
progressé l’an dernier. En revanche le déficit public lui se
creuse, obligeant les autorités à puiser dans les économies
accumulées durant les années fastes. Le Fonds de régulation des
recettes, créé justement pour compenser l’impact des fluctuations
du pétrole sur le budget a été ponctionné de 30 milliards de
dollars en 2014, probablement d’autant en 2015 et pourrait être à
sec dès cette année.
2ème: Pour
la troisième année consecutive, la France est le deuxième
fournisseur du pays derrière la Chine. Paris détient 10,5% du
marché avec 5,4 milliards d’exportations (et un solde légèrement
excédentaire) vers l’Algérie contre 16% pour Pékin.
2025: Même
quand le prix des hydrocarbures se remettra à progresser, ce qui
finira par se produire, l’Algérie ne sera pas au bout de ses
peines. Car dans le secteur tous les voyants ont déjà viré au
rouge : la production est en baisse, la consommation nationale flambe
et la part réservée aux exportations recule. Les experts estiment
que si les tendances actuelles se prolongaient, la Sonatrach, la
compagnie nationale, n’aurait plus rien à exporter d’ici 2025.
D’où les ordres venus du sommet de l’Etat d’accélérer la
prospection des ressources en gaz naturel. Et l’intérêt marquée
pour le gaz de schiste dont les réserves pourraient être
supérieures à celles du gaz naturel.
Patrick
Chabert
©
Capital.fr
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