braniya chiricahua




L'ancien se meurt, le nouveau ne parvient pas à voir le jour. Dans ce clair-obscur surgissent des monstres.
Antonio Gramsci

dimanche 29 novembre 2015

QU'EST-CE QUE DAECH, AU JUSTE ?

Le grand Israël (plan O. Yinon)


Remarque préalable : avant d'envahir l'Irak pour le détruire -et complaire ainsi au voeu le plus cher de l'Etat sioniste-, les yankees ont soudoyé les chefs de l'armée irakienne ( y compris le chef de la garde prétorienne de Saddam, son propre cousin !). L'armée américaine a pu, ainsi, entrer à Baghdad sans trop de pertes -et s'adonner au pillage de ses prestigieux musées et à l'assassinat de quelque 80 nucléaristes irakiens, oeuvre, selon certaines sources, d'une brigade d'agents israéliens sous oripeaux yankees.

Il était nécessaire de rappeler cet épisode, car des chercheurs sérieux -pas les bateleurs des plateaux de télévision-, font remarquer que parmi les 50 plus hauts dirigeants de DAECH, il n'y a pas un seul islamiste mais que tous sont d'anciens généraux de Saddam ! Quant au soi-disant calife El Baghdadi, il était prisonnier de l'armée américaine qui l'a opportunément libéré quand le projet DAECH s'est mis en branle.  


Des chercheurs ont fait remarquer que l'acronyme anglo-saxon pour Etat islamique en Irak et au Cham était ISIS (Islamic state on Irak and Sham); or ISIS est l'acronyme qui désigne les services spéciaux israéliens. Hasard ? 

Alors, autre hasard, la carte géographique d'ISIS se superpose à celle du grand  Israël, cette folie messianique qui devra s'achever par l'Armagedon, guerre totale dont ne subsistera que le peuple élu d'Israël (qui pourra alors dominer le monde).

Rappelons ce que dit Jahvé à son peuple :

"Lorsque l'Eternel, ton Dieu, t'aura fait entrer dans le pays dont tu vas prendre possession, et qu'il chassera devant toi beaucoup de nations, les Héthiens, les Guirgasiens, les Amoréens, les Cananéens, les Phéréziens, les Héviens et les Jébusiens, sept nations plus nombreuses et plus puissantes que toi; lorsque l'Eternel, ton Dieu, te les aura livrées et que tu les auras battues, tu les dévoueras par interdit, tu ne traiteras point d'alliance avec elles, et tu ne leur feras point grâce." (Deutéronome 7).

Il suffit, dès lors, de remplacer les noms des 7 nations évoquées par Egypte, Palestine, Jordanie, Liban, Syrie, Irak, nord de la péninsule arabique, pour avoir la carte du grand Israël.

Rappelons également que l'eschatologie musulmane est aussi messianique : elle croit en l'Armagedon ( El Malhama) qui verra le triomphe du faux messie (El massih ed-dajjal) dans un premier temps puis le retour de Jésus qui établira la paix et le règne du Bien sur terre. Le catholicisme, quant à lui, par sa métabolisation des catégories de la philosophie grecque, ne parle plus que du retour "en gloire" de Jésus, i-e, du triomphe de son message d'amour et de charité.

Pour finir, voyez cette vidéo extrêmement éclairante :




mercredi 25 novembre 2015

SUR LES ATTENTATS DE PARIS



Une analyse pénétrante d'Alain Soral, sociologue dissident, sur les tenants et les aboutissants des attentats de Paris (13 novembre 2015).

SUR LE TERRORISME






Le philosophe Francis Cousin parle de terrorisme. Ce que penser veut dire !

lundi 23 novembre 2015

DERRIÈRE LA PRISE D'OTAGES DE BAMAKO

  

Un article de Bernard Lugan



 L'attentat tragique de Bamako s'explique par la progression vers le sud d'un islamisme armé ayant profité du vide créé par la désastreuse intervention militaire française de 2011 en Libye.

Qui plus est, les réductions opérées sous la présidence de Nicolas Sarkozy ont eu pour conséquence de livrer au gouvernement de François Hollande, un outil militaire très affaibli. Dans ces conditions, malgré les prouesses opérées par les 3000 soldats français chargés de stabiliser un désert de près de 3 millions de kilomètres carrés, il était impossible à nos Armées, en raison même de leur format, de prévenir tout risque d'attentat au Mali.

Si le président Sarkozy n'avait réduit de façon si drastique les forces pré positionnées françaises, notamment à Bamako, en déclarant en 2006 dans cette même ville que "la France n'a pas besoin de l'Afrique", il est fort probable que les islamistes n'auraient jamais osé s'en prendre de la sorte aux intérêts européens.

Ceci étant, dans l'affaire de la prise d'otages de Bamako, six éléments ne doivent pas être perdus de vue :

1) Les autorités maliennes ont pour ennemis prioritaires les séparatistes touareg. Les jihadistes qui combattent ces derniers et qui ne demandent pas la partition du Mali sont de fait des alliés.

2) Refusant de reconnaître qu'elles ont laissé les jihadistes gangrener Bamako, ces mêmes autorités maliennes ont donc été promptes à faire porter la responsabilité de l'attaque de l'hôtel Radisson sur l'ennemi "nordiste" (touareg), ou sur des étrangers (le jihadiste algérien Moktar ben Moktar).

3) L'émiettement du pouvoir central s'accélère. L'armée malienne étant incapable de contrôler le pays, les autorités de Bamako ont en effet  encouragé la création de milices ethniques destinées à lutter contre les Touareg. Au nord, nous avons ainsi le GATIA ( Groupe d'auto défense touareg Imghad et alliés) dirigé par le colonel Ag Gamou. Au sud du fleuve, le FLM (Front de libération du Macina), héritier des milices peul d'auto-défense des années 2000 a basculé dans le fondamentalisme inspiré de la secte Dawa d'origine pakistanaise. Or, avec le Macina, c'est le coeur même du Mali qui est touché, et non plus les extrêmes périphéries sahariennes nordistes. Après les Touareg, les Maures et les Peul, les Sénoufo vont-ils à leur tour créer un groupe armé pour revendiquer la renaissance de leur Kénédougou?

4) Contrairement à ce qui est toujours écrit, au Mali, comme dans tout le Sahel, nous ne sommes pas d'abord face à une guerre de religion, mais en présence de résurgences de conflits historiques, ethniques, raciaux et sociaux sur lesquels, avec opportunisme, se sont greffés les islamistes. Le fondamentalisme islamique n’est donc pas la cause de la septicémie  sahélienne, mais la surinfection d’une plaie géo-ethnique.

5) Ceci étant, tout le Sahel est actuellement confronté à une tentative hégémonique de la part d'un islam radical, sorte de fourre-tout sublimant déceptions, désillusions et frustrations, comme hier le marxisme. Cet islam révolutionnaire financé par les monarchies pétrolières du Golfe a connu une progression silencieuse avant de s'affirmer aujourd'hui au grand jour avec l'introduction de normes nouvelles comme la prière de nuit (le tahajjud), la burqa, la séparation des sexes ou encore de nouveaux rites mortuaires.

6) Nous assistons à un renversement du paradigme nordisme = islam et sudisme = christianisme. La conversion galopante des ethnies sudistes a en effet changé la nature de l’islam local à travers la fabrication d’une artificielle identité africaine arabophone musulmane qui échappe de plus en plus aux structures traditionnelles.

NB : Pour tout ce qui concerne l'insolite et dévastatrice guerre que Nicolas Sarkozy, inspiré par BHL, déclencha contre le colonel Kadhafi, ainsi que sur ses conséquences régionales, voir mon livre Histoire et géopolitique de la Libye (novembre 2015), uniquement disponible à l'Afrique Réelle.

Bernard Lugan
21/11/15


http://bernardlugan.blogspot.fr/2015/11/derriere-la-prise-dotages-de-bamako.html

dimanche 15 novembre 2015

ATTENTATS DU 13 NOVEMBRE 2015 : QUI SONT LES VÉRITABLES RESPONSABLES ?

L'institut catholique Civitas a publié ce communiqué :

"L’Institut Civitas présente ses condoléances aux familles et aux amis des victimes de ces effroyables attentats de Paris qui endeuillent la France entière. Nos prières accompagnent toutes celles et tous ceux dont la vie a été volée ce soir du 13 novembre 2015. L’Institut Civitas fera célébrer une messe à leur intention.
Par-delà la peine et le deuil, le devoir de justice impose d’identifier et de punir les coupables de ces actes odieux.
Or, les coupables ne sont pas uniquement ceux qui ont appuyé sur la gâchette d’une arme ou fait usage d’une ceinture d’explosifs.
Les coupables sont aussi ceux qui, de manière irresponsable, ont organisé le chaos au Proche et au Moyen-Orient puis ont facilité, voire orchestré, le développement d’organisations djihadistes (Front al-Nosra, État islamique…) en Irak et en Syrie.
De nombreux personnages politiques français, de droite comme de gauche, portent une grave responsabilité dans cette situation en ayant contribué directement ou indirectement au financement et à l’armement de factions islamistes dans le cadre de manœuvres géopolitiques d’apprentis sorciers aux côtés de prétendus alliés d’une coalition mondialiste et des pétro-monarchies du Golfe.
De la même façon, les personnages politiques français, de droite comme de gauche, portent une grave responsabilité dans l’invasion migratoire qui déferle sur l’Europe et affecte durement la France, et qui facilite l’entrée sur notre territoire d’individus aguerris au terrorisme et aux techniques de guerre.
La France est aujourd’hui en état de guerre, par la responsabilité même de ceux qui ont pour mission de la gouverner et de la protéger.
Il faudra bien qu’un jour le tribunal de l’Histoire s’en souvienne."
Alain Escada, président de Civitas
 
Source : medias-presse.info


jeudi 12 novembre 2015

LA KABYLIE STATUFIÉE



C'est un article du quotidien El Watan qui nous l'apprend : érection de 11 statues de colonels de l'ALN en pays kabyle.

En soi, ce prurit soudain de statuaire serait plutôt sympathique dans un pays musulman qui interdit, en principe, la représentation figurée, surtout celle à trois dimensions (assimilée à l'idolâtrie). De plus, rendre hommage à des combattants de la liberté, relèverait du patriotisme bien compris. Seulement voilà :

1) les statues sont celles de colonels nés exclusivement en Kabylie, même quand ils ont exercé leur commandement dans une autre région (cas de Ouamrane, Dehilès, Zaamoum).

2) L'un des onze colonels n'en était pas un, puisqu'il s'agit de 'Abane Ramdane !

Et voilà où mène le chauvinisme régionaliste : à abraser les vérités historiques liées au choix des hommes pour ne laisser subsister d'eux que ce qu'ils n'ont pas choisi, leur lieu de naissance. On arrive ainsi à des absurdités telles celles qui font voisiner le nom et l'effigie de 'Abane -promoteur de la suprématie du politique sur le militaire- avec ceux qu'il qualifiait de « gardiens de chèvres portant une arme » (dixit F. Fanon).

De même, le malheureux 'Abane est-il ramené aux dimensions de ceux-là mêmes qui ont donné leur onction à son assassinat -Krim Belkacem (à qui 'Abane donnait du Aghioul) et Ouamrane (que 'Abane n'aimait pas pour des raisons, disons, personnelles)-, deuxième absurdité à quoi mène ce chauvinisme de l'extrait de naissance.

Et que dire de la « présence » de celui qui s'est fait rouler comme un bleu dans la farine sanglante de la… bleuite, le sanguinaire Aït Hamouda qui, non content d'avoir égorgé des centaines d'élèves et d'étudiants algériens venus rejoindre les maquis, allait exterminer en une nuit un village -kabyle- entier, mille personnes égorgées ?

Et puis de cette autre, celle de Mohamedi Saïd, devenu dans les années 90 vice-président du FIS et qui revendiquait le massacre de Mélouza (1958) en insultant les morts de cette dechra, tous qualifiés de traîtres.Même les enfants ?

Abolition du simple bon sens historique-critique, régression du sens national vers le tribalisme primaire, continuez comme cela, mes frères et Georges Soros se fera un plaisir de vous concocter bientôt une bonne révolution, couleur jaune canari.



UN ARTICLE RACISTE DE AÏT BENALI BOUBEKEUR 

Le Huffington Post Maghreb vient de publier coup sur coup deux articles sur l'ouvrage de Yassin Temlali (YT)-La genèse de la Kabylie-, l'un, magistral, de l'historienne Malika Rahal, l'autre, tendancieux et même, disons-le, honteux, d'un « électronicien passionné d'histoire » (c'est lui-même qui se présente ainsi).

Autant, en effet, l'article de M. Rahal se situe au niveau de l'abstraction et du concept (sa réflexion a pour objet la notion de constructivisme qu'elle estime être au centre de la pensée de YT : ou comment la Kabylie a été înventée), autant celui de l'électronicien se traîne dans les approximations historiques et les lieux communs racistes. À le lire -et bien qu'il prenne des précautions toutes rhétoriques dans l'exorde de son écrit-, on a l'impression que l'essentiel de l'ouvrage de YT se ramènerait à la séquence de l'arrivée des Hilaliens, ces expulsés (sic) de l'orient, cette barbarie (resic) qui a fait fuir les Berbères vers les montagnes et qui serait même à l'origine du caractère violent des Algériens (sic encore) ! L'école psychiatrique d'Alger ( que F. Fanon dénonçait comme raciste) n'aurait pas dit mieux. Autant de mots faits pour blesser avec autant de contre-vérités historiques et de confusion systématique entre Berbères et Kabyles.

- Les Hilaliens (Bni-Hillal et Bni-Souleym) étaient une confédération de tribus guerrières, originaires du Nejd. Dernières converties à l'islam, elles participèrent, aux côtés des Qarmates, au sac de La Mecque et au transfert de la pierre noire de la Kaaba à Bahrein (où les Qarmates avaient érigé un Etat à communisme intégral). Établis sur la rive orientale du Nil, les Hilaliens furent sollicités -et rétribués- par le calife fatimide pour une mission précise : aller châtier les renégats zirides qui venaient d'apostasier le chi'isme. Les Hilaliens écrasèrent l'armée des zirides sanhajas quelque part en territoire tunisien actuel et redescendirent vers le désert, leur lieu naturel. Leur marche vers l'ouest -Taghriba- se déroulera suivant une ligne horizontale située aux confins des hauts-plateaux et de l'Atlas saharien.

Comment oser dire, alors, que les Berbères, fuyant la barbarie hilalienne, se sont réfugiés sur les montagnes de la Kabylie ? Aussi faux qu'absurde, les seuls Berbères qui fuyaient étant probablement les débris de l'armée ziride. Mais cette absurdité n'a-t-elle pas, en réalité, une fonction qui est de cacher une donnée historique attestée par tous les historiens, celle de la coexistence des Hilaliens et des Berbères znata ? Deux exemples, à ce titre :

-Dans son livre Jazya,, princesse berbère, (éditions Chiheb), Nadia Chelligue dévide la légende aurésienne de cette princesse znata qui épouse le guerrier hilalien Diyab. Le mythe réalise ainsi au niveau symbolique la réalité de l'union de la berbérie agropastorale -principe féminin, la terre- avec l'arabe guerrier et poète -principe masculin, le ciel.

-Leur geste va emmener les Hilaliens au pied de l'atlas saharien. Là, ils côtoieront une grande tribu berbère znata, qui servait de makhzen aux Almohades. Quand l'empire implosa, cette tribu, les Bni Abdelwad, s'empara de Tlemcen et fonda le royaume zianide, sous la conduite de Yaghmoracen. Ce dernier, en butte aux attaques des Mérinides de Fès, enrôla une puissante fraction des Hilaliens, les Bni-'Amer, pour lui servir de Makhzen. Yaghmoracen récompensera les Bni-'Amer en leur attribuant la plaine d'Oran.

On voit ce qu'il en est de cette antienne ressassée par des esprits tribalistes primaires, présentant les Arabes comme des colonisateurs avant la lettre. C'est si peu vrai, d'ailleurs, que des historiens contemporains avancent une explication à cette énigme historique : la foudroyante islamisation du Maghreb par quelques centaines de cavaliers arabes, au 7° siècle. Aujourd'hui, les spécialistes avancent l'explication suivante : si les Berbères maghrébins se sont islamisés si rapidement c'est parce que la nouvelle religion leur a été apportée par leurs frères Berbères libyens de Cyrénaïque.

Les Berbères de Cyrénaïque, poussés par la sécheresse, cherchaient constamment à rallier la vallée du Nil pour s'y installer. D'où un incessant conflit avec l'Egypte. Quand les Arabes s'emparèrent de ce dernier pays (après avoir vaincu l'empire byzantin), les Berbères de Cyrénaïque les accueillirent avec joie et embrassèrent leur religion. Et ce sont ces Berbères, encadrés par quelques légions arabes, qui islamiseront le Maghreb. 

Joli coup de pied de l'âne, n'est-ce pas ?


dimanche 1 novembre 2015

POUR EN FINIR AVEC LE 1er NOVEMBRE 1954




C'est une affaire entendue : dès qu'il s'agit de l'histoire de la guerre d'indépendance algérienne, on ne peut pas éviter l'expression « occasions manquées ». Certains -comme l'historien Gilbert Meynier- la récusent. « Il n'y pas eu d'occasions ratées parce qu'il n'y a pas eu d'occasions tentées » dit-il ici :

https://www.youtube.com/watch?v=E3IYRjUb190#t=12.

En effet. Ce que l'on nomme occasions ratées n'est qu'une longue suite d'insignes lâchetés d'un pouvoir central qui ne ratait jamais une occasion, lui, de se coucher devant les rodomontades ou les manœuvres des chefs autoproclamés du peuplement européen de la colonie. Un quarteron de politiciens racistes qui auraient voulu s'en tenir au code de l'indigénat de sinistre mémoire. Car l'aveuglement des tenants de la colonisation, leur refus de toute réforme -même de la plus platonique comme celle du projet Blum-Violette qui voulait accorder la citoyenneté française à quelque 20 000 Algériens, et qui fut farouchement combattue et coulée-, a une origine fondamentale : le racisme. Tout projet colonial exige, en effet, la déshumanisation de celui à qui on va voler sa terre et le réduire à merci. Le colon se donne ainsi et à peu de frais bonne conscience. Ce racisme peut évidemment évoluer en paternalisme racialiste (« Mes Arabes sont de grands enfants »), mais sans oublier que « qui aime bien châtie bien », preuve par le 08 mai 1945.

Cette intransigeance et cette cécité ont fait le jeu de ceux qui, de l'autre côté de la barrière raciale, rêvaient de prendre la place du maître, parce qu'ils ont été à l'école du maître et qu'ils ont goûté fantasmatiquement aux délices de la citoyenneté. Alors, le citoyen fantasmé en eux n'accepte plus d'être traité en indigène. Il se révolte. Est-ce un hasard que l'on nomme la guerre d'indépendance « Thaoura », qui veut dire « s'insurger »?. (Remarquons que les grandes insurrections dans les Caraïbes et en Amérique du sud au XIX° siècle ont été le fait des métis : le métis est deux et à partir d'un certain moment, le Blanc en lui n'accepte plus d'être traité en Noir). Être allé à l'école du maître veut dire qu'on en avait les moyens. De fait, les hommes de l'Insurrection appartiennent pour l'écrasante majorité d'entre eux à la notabilité rurale (paysans petits et moyens) et à la petite bourgeoisie citadine (commerçants, fonctionnaires subalternes de l'administration, professions libérales -avocats, médecins, pharmaciens). Ajouter à cela que certains d'entre eux, d'ascendance koulouglie, s'estimaient d'autant plus légitimes à prendre la place du maître que la colonisation française a empêché leurs ancêtres de s'établir en dynastie régnante. Il suffit de citer quelques noms (Boussouf, Bentobbal, Kiouane…) pour que la religion du lecteur soit faite : sensation de bise glacée dans l'échine…

La légende -tenace- qui attribue le 1er Novembre 54 aux éléments plébéiens ne résiste pas une seconde à l'analyse des faits. Il suffit de regarder les CV des responsables. (Ainsi, mon douar -El M'saada, à 5km de Rio-Salado-El Malah- a participé activement au 1er Novembre, est devenu un sanctuaire pour l'ALN et a donné quelque 210 martyrs, c'est-à-dire la quasi totalité des hommes valides. Tous étaient des paysans cultivant leur lopin de terre, en général du vignoble ; certains étaient aisés. Tous étaient des Badissiya, fiers de leurs origines arabes -quand l'Arabe était au centre du mépris racial-, avant de passer au FLN ; beaucoup étaient lettrés en arabe pour avoir fréquenté la medersa du douar. Pas un chômeur ou un khammès parmi eux.) Les raisons d'une telle mystification sont évidentes : le PPA ayant la prétention de parler au nom du peuple algérien, ses dirigeants se sont pris au jeu de leur propre idéologie, se sont pris pour le peuple en acte. Mais prétendre parler au nom du peuple, c'est prétendre détenir la vérité en politique : le totalitarisme était en germe dans le PPA ; il s'épanouira dans le FLN/ALN et triomphera dans le système ANP/SM actuel (Armée + Sécurité militaire).

« L'anatomie de l'homme est la clé de l'anatomie du singe », avait dit Marx. Les Algériens d'aujourd'hui disent de leurs dirigeants : « Comment tu étais et comme tu es devenu ! » (paraphrase d'une chanson de Khaled « ki kount wa ki wallit »). Ils seraient mieux avisés de dire : « Sachant ce que tu es devenu, voici ce que tu étais ».

Pour en revenir aux occasions « non tentées », voici, pour la bonne bouche, le texte de la déclaration du Bureau politique du PCA, datée du 02 novembre 1954. La voix de la raison, de la mesure et de la justice, celle du courage politique et de l'humanisme. Ah si...


« Le Bureau politique du Parti communiste algérien, après avoir analysé les informations au sujet des différentes actions armées qui ont eu lieu dans plusieurs points du territoire algérien et en particulier dans les Aurès, estime qu’à l’origine de ces événements il y a la politique colonialiste d’oppression nationale, d’étouffement des libertés et d’exploitation, avec son cortège de racisme, de misère et de chômage, dont les sphères officielles sont obligées de reconnaître aujourd’hui l’existence.

« Le Bureau politique estime par conséquent que les responsabilités fondamentales dans ces événements incombent entièrement aux colonialistes qui, malgré les expériences du Vietnam, du Maroc et de la Tunisie, s’obstinent dans une politique d’opposition et de force, face aux aspirations légitimes du peuple algérien, pour maintenir les privilèges d’une poignée de gros propriétaires fonciers, de banquiers et de trusts coloniaux.

« Il rappelle que la répression n’a jamais réglé et ne réglera pas les problèmes politiques, économiques et sociaux que pose devant le monde contemporain l’essor irrésistible des mouvements nationaux de libération.

« Il estime que la meilleure façon d’éviter les effusions de sang, d’instaurer un climat d’entente et de paix, consiste à faire droit aux revendications algériennes par la recherche d’une solution démocratique qui respecterait les intérêts de tous les habitants de l’Algérie, sans distinction de race ni de religion, et qui tiendrait compte des intérêts de la France.

« Le Bureau politique dénonce la violente campagne de panique, de haine raciale et de diversion de la presse réactionnaire et colonialiste, dont le but est de dresser les uns contre les autres Musulmans et Européens, appelés à vivre ensemble en Algérie, leur patrimoine commun à tous.

« Il dénonce les appels à la répression bestiale de cette presse aux ordres des gros seigneurs de la colonisation dont la richesse est faite de l’immense détresse de millions d’Algériens.

« Le Bureau politique invite les Algériens, sans distinction d’origine, et plus particulièrement les travailleurs européens, à ne pas se laisser influencer par la propagande mensongère des milieux colonialistes, à réfléchir à ces événements, à rejeter toute arrière-pensée raciale, pour les juger sainement. Il leur demande de se souvenir que cette même propagande et ces mêmes menaces proférées et appliquées au début de la crise en Tunisie ont dû faire place –parce qu’elles ont fait faillite- après une douloureuse expérience, à une ère nouvelle pour le règlement du problème tunisien.

« Il souligne les contradictions entre la thèse officielle suivant laquelle le calme règne actuellement en Algérie et les véritables mesures de guerre prises par le gouvernement général en accord avec le gouvernement français.

« Le Bureau politique proteste contre ces mesures de terreur qui tendent, en créant un climat d’insécurité générale à ouvrir la voie à une répression généralisée frappant tous les patriotes, tous les hommes épris de liberté et de démocratie.

« Le Bureau politique appelle tous les patriotes, tous les démocrates musulmans et européens, à s’unir et à agir pour obtenir que soient rapportées les mesures répressives de l’administration, pour demander la libération de tous les progressistes, démocrates et militants syndicaux, arbitrairement arrêtés, et pour qu’enfin soit amorcée une politique nouvelle qui, rompant avec les solutions de force, fera droit aux justes et légitimes aspirations du peuple algérien. »

Alger, le 2 novembre 1954 Le Bureau politique du parti communiste algérien